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lundi 2 octobre 2023

 

Chocolaté












Samy Manga

Ed Ecosociété, 22/03/2023, 136 pages


En refermant ce livre, je me sens encore plus amère que le chocolat que je consommais sans me poser de questions, à part peut-être quelque interrogation sur le goût généré par la teneur en cacao des carreaux absorbés goulûment. C’est bon en cas de déprime dit-on ! Considération d’occidental gâtée, c’est l’idée qui me vient à l’esprit, et je me demande vraiment qui doit être déprimé dans cette histoire, certainement pas les Européens qui vivent dans l’opulence, mais plutôt les planteurs de cacaoyers exploités, abusés, décimés par les traitements dangereux qu’on leur impose, maintenus dans la pauvreté à coup de sermon de prêtres blancs qui leur promettent une place de choix dans l’au-delà, usés après leur courte vie de labeur.  

Un sentiment de honte, voilà ce que je ressens à la lecture de ce roman marquant qui raconte l’histoire d’Abéna, élevé sur l’exploitation de son grand-père et participant activement jusqu’à son adolescence à la production des précieuses fèves, l’or vert qui leur permet de vivre bien pauvrement, pour satisfaire les caprices des occidentaux.

Désormais, prélever un carreau dans une tablette ne pourra plus pour moi, être un acte anodin car si on peut s’en douter vaguement, parce que cela se produit bien loin, la consommation du chocolat vendu par des empires qui s’enrichissent toujours plus est à l’origine de la déforestation, de la fin de la biodiversité, de la mort d’individus quasi esclaves, du travail d’enfants victimes de la gourmandise des pays riches, d’enfant qui n’ont trop souvent même pas vu ne serait- qu’une barre de chocolat, leur vie se réduisant aux semences, à l’irrigation, et ne voyant que des cabosses et des fèves de cacao. Triste réalité.

Je me console en me disant que le commerce équitable se développe dans ce domaine, j’ai eu la chance de visiter l’été dernier, une fabrique de chocolat équitable qui travaille avec deux plantations de Sao Tomé, le maître chocolatier se rendant régulièrement sur les exploitations, et garantissant des conditions de travail et des salaires décents à ses cultivateurs, tout en assurant la scolarisation des enfants. Ce chocolatier a choisi d’abandonner son commerce avec le Ghana pour cause de déforestation. J’ajouterai que ce chocolat ne contient ni lécithine de soja, ni huile de palme. C’est rassurant.

Ce beau roman, œuvre d’un auteur camerounais engagé, connu pour ses écrits poétiques et qui termine son récit par un magnifique poème, est de ces écrits qui font avancer, qui parviennent à faire réfléchir et évoluer. Un roman qui devrait être lu par le plus grand nombre.

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