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mercredi 27 septembre 2023

 

Les tourmentés












Lucas Belvaux

Ed Alma, 19/08/2022, 345 pages



Désolée mais je n’ai pas apprécié ce roman. Si j’ai ressenti un début prometteur, j’ai vite déchanté, moi qui pensais me régaler d’un récit à couper le souffle, sorte de thriller, version téléréalité, ce qui à mon sens donnait le ton dès le départ, il n’en fut rien ! J’ai bien conscience que le problème vient de mon comportement de lectrice : j’ai besoin de serrer les dents, de m’engloutir dans le roman, de me pâmer avec les rebondissements, j'ai également besoin d'une action, même modérée… Et j’ai dû me plonger dans le mental de personnages avec leur personnalité, les connaissances qu’ils ont de la situation de Skender, notre héros, tantôt victime, tantôt battant, me confronter à une femme qui décide de tuer par caprice, par vengeance… contre qui ? Une Manon, ex épouse du héros, qui a bien des difficultés à se rendre compte de la situation du père de ses enfants, et pour cause. Jeu entre les personnages, complicités, règlement de compte, triste psychologie d’un ex légionnaire qui n’a plus rien à perdre… 

J’ai trouvé tout cela long, très long, mais comme je n’aime pas abandonner les livres, je suis tout de même parvenue à la fin, une fin sans relief, peut-être apaisante.

Ne passez pas votre chemin pour autant, cela n’est que mon ressenti !

lundi 11 septembre 2023

 À 1000 Miles de la liberté

L'INGÉNIEUSE ÉVASION DU PLUS CÉLÈBRE COUPLE DE L'AMÉRIQUE













Ellen et William Craft

Ed Payot, 5/10/2022, 144 pages


Ce livre raconte l’extraordinaire histoire d’Ellen et William Craft, esclaves dans l’Etat de Géorgie, et qui préparent leur évasion. Leur seul désir est de se rendre dans les Etats libres et abolitionnistes d’Amérique. Ce texte, dont le narrateur n’est autre que William Craft, sera publié par Ellen en 1860.

Si le début du récit, bien avant l’évasion, peut paraître long, il précise clairement le contexte de cette évasion, les risques encourus par les deux fugitifs, le danger d’une telle expédition. Mais William parvient à persuader sa femme de se lancer dans cette aventure. Déguisée en homme, elle devient un gentleman accompagné par son esclave. Chemin dangereux, les esclavagistes étant à l’affut de marchandise humaine à racheter, écueils sur cette route de la liberté, les esclaves ne pouvant se mouvoir si facilement, le couple trouvera finalement des aides précieuses qui les mèneront en Angleterre.

On sent de suite le climat tendu aux Etats-Unis, la guerre de sécession se rapproche, les tensions entre abolitionnistes et esclavagistes sont clairement ressenties.

Des romans sur cette question, j’en ai lu quelques-uns, mais jamais un ouvrage concernant les lois régissant l’esclavage ne m’a paru si complet. En un peu plus d’une centaine de pages, on y apprend les règles concernant les esclaves, entière propriété des maîtres, plus mal traités que les animaux, et beaucoup moins considérés, on y prend connaissance des lois et décrets de la cour suprême américaine, des lois révoltantes, on y côtoie de belles personnes, on constate également que les révérents pasteurs n’œuvrent pas que pour le bien de l’humanité tout entière puisque qu’ils défendent les droits des riches propriétaires esclavagistes.

Plus qu’un roman, on se retrouve face à un témoignage qui se transforme en un documentaire édifiant sur cette période d’avant-guerre pour les Etats-Unis, période bien noire de son histoire et dont elle ne sortira que difficilement.

Le courage et la volonté d’Ellen et William Craft doivent être portés à la connaissance de la majorité des lecteurs. C’est là le respect que nous leur devons après cette vie mouvementée et ce chemin semé d’embûches parcouru avec une foi à soulever des montagnes.

mercredi 6 septembre 2023

 Maîtres du jeu













Karine Giebel

Ed Pocket, 12/09/2013, 128 pages


Certains auteurs, opérant comme par magie, parviendront toujours à me surprendre, parmi eux, Karine Giebel et ses romans, avec les tempêtes qu’ils provoquent dans mon esprit et je mets d’ailleurs plusieurs jours à lâcher même lorsque le dénouement est venu et que le livre est refermé. Ce recueil de deux nouvelles, je me suis dit que ça ne pourrait pas m’empêcher de dormir, erreur !

Dans la première nouvelle, l’autrice imagine le crime parfait, sujet qui me laisse toujours pensive car la littérature abonde de crimes parfaits dont l’auteur est trahi pas un détail insignifiant, Columbo lui-même affirme que le crime parfait n’existe pas. Notre romancière est pourtant parvenue à imaginer ce crime parfait qui ne peut faire condamner le meurtrier. Quel génie ! Et comme d’habitude, elle réserve la plus belle surprise pour la fin.

Dans la deuxième nouvelle, le récit est plus difficile à supporter, on voit venir l’horreur, on est témoin directe des événements. On se retrouve donc enfermé dans un bâtiment qui abrite des enfants handicapés venus en classe de découverte avec leur éducatrice, et … Un sérial killer, un vrai !!! il s’agit donc d’une prise d’otages. Bien sûr, on a vraiment envie de savoir comment tout cela va se terminer… Et, là c’est mon avis, les dernières lignes sont volontairement ambigües, il suffit d’un mot pour que la fin varie. C’est peut-être de l’imagination de ma part, si d’autres ont ressenti cette fin de la même façon, je veux bien en discuter sur ma messagerie (pour ne pas spoiler).

Donc frisson garanti, très bon cru Karine Giebel !

dimanche 3 septembre 2023

 

Panorama












Lilia Hassaine

Ed Gallimard, 17/08/2023, 240 pages


Celui dont la maison est de verre doit se garder de jeter des pierres aux autres.” C’est ce qu’affirme Courteline et c’est la désormais la loi adoptée par  la majorité de cette société française de 2049 qui a aboli les institutions pour parvenir à la démocratie au sens littéral du terme puisque l’on aura plus recours à des représentants, mais que c’est bien la société qui se fera juge de toute infraction au code de civilité, chaque individu sera témoin de la vie des autres puisque chacun devra s’établir dans une maison de verre et pourra surveiller les actions d’autrui. Le grand maître sera le dossier de la transparence, lisible par tous, qui indiquera les faits et gestes des citoyens.

Une telle société est-elle possible ? Si chacun peut trouver des éléments de réponse, je trouve regrettable que ce roman ne se consacre pas totalement à cette réflexion. Bien sûr, on s’apercevra que la transparence peut certainement limiter les méfaits, mais pas les éradiquer, pour preuve, ce double crime perpétré un assassin qui ne devrait pas recevoir ce qualificatif et qui s’expose à un jugement exempt de toute impartialité puisque la loi écrite et ratifiée n’existe plus et qu’elle est remplacée par le jugement populaire.

C’est la raison pour laquelle je me sens mitigée : on se retrouve face à une dystopie qui un peu plus creusée, pouvait aboutir à un descriptif beaucoup plus détaillé de cette nouvelle société, mais l’autrice a préféré parachuter quelques faits montrant les travers de ce monde transparent : personnes qui vivent comme dans une télé-réalité, dictature des réseaux sociaux et perte de l’intimité des individus. Il y avait de quoi bâtir un roman entièrement basé sur ces faits et dénicher tous les travers d’un tel fonctionnement, avec des personnages refusant cette transparence et agissant activement comme le fait George Orwell dans son roman 1984, et il y en a dans le roman, mais montre-t-ils vraiment une résistance active ?

Le choix de Lilia Hassaine porte sur une enquête menée par le personnage principal, Hélène qui semble avoir des difficultés pour affirmer sa personnalité, peut-être parce qu’elle subit le regard de l’autre, parce que la transparence transforme les individus en esclaves de cette société désormais aux aguets des moindres faits et geste de l’autre, parce que la communication n’est plus vraie… Parce qu’officiellement Hélène accepte ce fonctionnement. Toutefois, il faut lire entre les lignes, elle expose sa vie, se raconte, donne peu son avis et reste souvent dans le descriptif, mais est-elle si transparente ?

Je sens à l’écriture de cette chronique qu’il ne faut pas nécessairement tenir compte de mon avis parce que personnellement, j’aime les thrillers et l’action, les récits au rythme soutenu, les rebondissements multiples, les scènes effroyables qui font que le roman vous capte.

Ce n’est pas le cas dans ce roman qui cependant, si on aime les récits qui véhiculent un sujet épineux transmis par la mémoire du personnage principal sous forme d’exposé en laissant le lecteur être le seul juge avoir eu connaissance des aspects de cette société, on peut vraiment apprécier cette dystopie.

J’ai tout de même passé un bon moment de lecture, particulièrement dans la deuxième partie, dans laquelle, après une sorte d’enlisement de l’enquête, des éléments viennent s’ajouter pour aboutir au dénouement.