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jeudi 24 octobre 2019



L'outsider


Stephen King
Ed Albin Michel

J’ai passé un bon moment de lecture avec l’outsider, ce compagnon indésirable qui m’a servi ce que j’aime dans les thrillers : un policier entêté qui va au bout de ses idées, un dur-à-cuire-mais-pas-trop-tout-de-même,  avec ses doutes, ses angoisses et son incrédulité l’amenant à envisager ce qui est POSSIBLE en ce bas monde, une gaffe de première de sa part dès le début (quoique… ?), et puis surtout un beau casse-tête sur fond de critique de la société américaine pour qui, comme moi,  n’a pas trop fréquenté Stephen King, qui, je le constate, sait saupoudrer de fantastique, des histoires qui serait peut-être sans relief sans ce procédé.


Des personnages énigmatiques à souhait, et un certain suspens. Je précise bien un certain suspens, car n’étant pas une inconditionnelle de cet auteur, j’ai trouvé l’action très lente, entrecoupée de réflexions et pensées des personnages exprimant leurs doutes, leurs manies, leurs intentions… Trop de dilution tue le suspens à mon humble avis. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle j’ai des difficultés à aborder un roman de king. J’ai tenté Dumas Key et 22/11/63, j’ai trouvé que ces histoires avaient beaucoup d’intérêt, mais je n’ai pas pu terminer pour cause d’action trop lente à se mettre en place. En revanche, Mr Mercedes m’a pleinement satisfaite.


En résumé, J’aime Stephen King et je suis preneuse si vous avez des titres de romans qui privilégient l’action avec un grand A.

mardi 22 octobre 2019


Terrible vertu


Ellen Feldman
Ed du cherche midi.


Margaret Sander, célèbre en son temps   agitatrice, rebelle, dérangeante dans une société américaine du début du XXème siècle. Son caractère rebelle, sans lequel elle n'aurait pu aller au bout de ses idées et poursuivre son action, elle le doit sans nul doute à son départ dans la vie, ses souffrances, la honte qu’elle éprouva lorsque petite, toute possession pouvait lui être reprochée, on assistera à une scène importante de son enfance dès le début du récit qui montre combien elle ressentit l’humiliation.


Devenue adulte, infirmière de son état, elle constatera la misère des femmes dont le métier, une fois mariée, se limiterait à mettre au monde des enfants, sans pouvoir contester, diminuée, usées par les grossesses répétées, usées par le labeur qu'implique la charge de familles nombreuses, victimes de privations liées à des situations précaires aggravées par la présence de bouche à nourrir. Certaines mourront suite à des avortements clandestins. 


D’abord membre d’un groupe socialiste, elle défendra la cause des plus démunis, puis orientera son combat vers le droit à la contraception alors balbutiante. Bien sûr elle laissa de côté ses enfants afin de mener son combat, bien sûr son entourage fut en droit de contester, de critiquer son comportement, contestation très bien exprimée dans ce livre, par des lettres adressées à la mère, à l’épouse, à la sœur, à la maîtresse que fut cette femme.


Pour ma part, je me suis contentée de lire sans juger en me concentrant sur son parcours de militante. Quelques femmes sont connues pour avoir laissé de côté leur famille au nom de leur combat : Dolores Ibarruri envoya ses enfants en Russie pour les protéger et se sépara de son mari afin de défendre la cause féminine et lutter contre le fascisme.


Sa foi l’aidant à soulever des montagnes, Margaret Sanger quant à elle, sauva bien des vies et allégea le destin de bien des femmes. Elle mérite le qualificatif de pasionaria du contrôle des naissances. 


Cette biographie est passionnante, son auteure a su faire comprendre au lecteur, les états d’âme de cette grande dame, son acharnement, voire son entêtement, ses relations sans volonté de lendemain avec les hommes, s’autorisant le plaisir sexuel
si tabou et alors reproché aux femmes de cette époque qui osaient le montrer. Mais ce récit est encore plus que cela tant il exprime à merveille le ressenti de la grande dame. 

Bien sûr, ses idées seront sujettes à controverse, particulièrement après la deuxième guerre mondiale, alors qu'elle sera accusée d'avoir prône l'eugénisme, attaques qu'elle conteste clairement dans ce livre.


La fin est merveilleusement écrite, elle résume l’œuvre d’une vie remplie qui se termine par  la sortie triomphale d’une femme qui s’est donnée corps et âme à sa cause, et qui s'en va paisiblement entourée de ses proches,  mais également sa solitude face à un remord que je tairais afin de ne rien dévoiler. remord qu'elle emportera dans sa tombe.


J’ai beaucoup appris de cette personne à laquelle nous devons notre confort en tant que femmes aujourd’hui.


Je remercie Babélio et les éditions du cherche midi pour ce partenariat.


lundi 7 octobre 2019


Ce caillou dans ma chaussure

L'histoire de Salim
Silène Edgar
Ed Gephyre


La guerre, on en a entendu parler, on y est confrontés par nos lectures, par ouï dire, par les infos, on réalise sa cruauté par le biais d’images soigneusement sélectionnées lors des journaux télévisés, on sait qu’elle existe, quelque part… on y pense et puis on oublie… Parce qu'on ne la côtoie pas.. 


Et quand vous êtes professeur de français dans la campagne, loin du tumulte de la ville, dans un collège de province où il ne se passe pas grand-chose, et que soudain, le principal vous demande d’apprendre la langue de Molière à Salim, qui arrivé de Syrie, probablement orphelin, livré à lui-même, puis accueilli dans une famille qui peut avoir des difficultés à s’adapter à ses  pratiques religieuses, et cela se conçoit aisément, un ado qui porte en lui les horreurs vécues en Syrie, un ado qui ne parvient pas à se faire entendre, qui pleure parce qu’il ne pourra pas faire le Ramadan, parce qu’il ne peut pas manger Halal, parce qu’il veut un téléphone pour avoir des nouvelles des siens, des demandes légitimes … Que faites-vous ? Vous en rêvez la nuit, vous y pensez… souvent, très souvent, vous vous sentez impuissant, vous essayez de parlementer avec les éducateurs, les collègues, le principal… En vain…


C’est exactement ce que veut nous amener à comprendre Silène Edgar à travers ce court mais efficace récit : l’accueil d’un émigrant n’est pas chose facile, trop de vécu que l’on ne peut partager avec sa famille d’accueil, avec un professeur plein de bonne volonté qui ne sait pas quels sujets aborder sans froisser, sans blesser, sans faire pleurer... Divers thèmes sont abordés à travers l’histoire de Salim : la religion, la tolérance, la compassion, mais également le manque de moyen pour accueillir ces émigrants, des éducateurs qui n’ont pas de solution, pas de psychologues, et une bonne lourdeur administrative.

 

L’auteur soulève des questions auxquelles je n’avais pas forcément pensé, c’est la raison pour laquelle ce récit restera gravé dans ma mémoire.  Un livre à lire et à relire.


Je remercie Babélio et les éditions Gephyre pour ce partenariat

mardi 1 octobre 2019


Changer l'eau des fleurs



Valérie Perrin
Ed Albin Michel

Vaillante,

Intelligente,

Obligeante,

Lucide,

Emouvante

Tendre

Touchante

Empathique


C’est ainsi que m’apparaît ce petit bout de femme que le mauvais sort ne semble pas avoir épargné, que la vie n’a aucunement chouchoutée, qui s’est laissée porter au hasard des rencontres, par des vents favorables ou pas, déchaînant haine ou passion, digne d’amitié et attendrissante. Un personnage bien attachant qui constitue l’âme d’un roman passionnant où se croisent, et se recroisent, s’affrontent ou s’ignorent un cortège de personnages tous plus intéressants les uns que les autres, riches ou pauvres, pervers, dévoués, au verbe haut ou taiseux, au comportement trompeur , souvent pour le  lecteur qui se montre prompt à juger.


Quelle fut donc la recette de l’auteure pour parvenir à nous livrer une telle pépite ? De la psychologie, de la philosophie, du suspense qui se prolonge tout au long du récit, du drame, des amours déçues ou heureuses, voire éternelles, de l’intrigue suffisante pour exciter la curiosité du lecteur jusqu’à la fin… Mais ce savant et délicat mélange ne saurait se passer d’un levain essentiel : l’humour sous toutes ses formes, léger ou noir (n’oublions tout de même pas qu’une bonne partie du récit a pour cadre un cimetière).


Parmi les personnages que j’ai particulièrement appréciés, je citerais nos trois fossoyeurs et la comtesse aux délicieuses répliques qui apparaît trop peu à mon goût.

Oui j’ai mis du temps à le lire, peut-être parce que je l’ai dégusté, que j’ai aimé retrouver Violette chaque soir. Sans doute me suis-je rationnée : par plus de quelques pages à chaque fois pour le faire durer. A présent je me sens un peu seule, à moins qu’une prochaine pépite vienne se loger dans mon cœur de lectrice.