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dimanche 20 avril 2025


Ajouter de la vie aux jours

 

 











Anne-Dauphine Julliand,

Ed Les Arènes, 10/10/2024, 137 pages


Ce livre m’a été conseillé parce que je subis actuellement une épreuve douloureuse, et je me suis empressée de me le procurer. Je me suis vite aperçue que face à la souffrance éprouvée par l’autrice, je devais relativiser autant que possible. Quelle belle personne que cette femme qui n’a pas hésité à partager sa souffrance, que de larmes a -t- elle dû verser, que de force de caractère a-t-elle dû se forger pour enfin entrevoir de la lumière dans sa vie.


Si parfois, certains passages sont difficiles à supporter, notamment sur l’absence ressentie à certaines occasions où l’habitude voulait que ce fils, mort la veille de ses 18 ans, soit présent aux côtés de ses parents, d’autres appellent au soulagement, il s’agit pour moi de tous ces passages dans lesquels on sent à quel point la vie reprend le dessus, où, passées quelques étapes du travail de deuil, ses défunts deviennent partie intégrante de sa personne, où elle comprend aussi que bien des bribes de vie qui se présentent  constituent de beaux instants de bonheur, que chaque jour amène son lot de bien-être, que vivre pleinement un jour qui ne ressemble jamais au lendemain qu’il est inutile d’envisager, peut offrir la sérénité à qui veut bien l’accueillir. Son cocktail : accueillir le beau, l’agréable, ne pas chercher à lutter contre son ressenti, prendre soin de sa personne, loger dans l’écrin de son cœur, ceux que l’on a aimés pour qu’ils y restent vivants à jamais. Quel parcours !

 

À travers cet écrit, Anne-Dauphine Julliand nous aide à comprendre que nous possédons tous des ressources pour faire face à l’inconcevable bien que pour cela, il faille cheminer et que la route s’avère  chaotique, semée d’épreuves et demande du courage, de l’abnégation lorsque l’on doit exister et agir pour ceux qui restent, on imagine bien que des épreuves que la vie nous réserve, on puisse sortir grandi.


lundi 14 avril 2025

 

L’île des souvenirs

 










Chrystel Duchamp

Ed de l'Archipel, Livre de poche 24/01/2025, 288 pages


Ce thriller psychologique me laisse perplexe. Si je me suis réjouie en découvrant le récit aux allures de thriller classique si l’on peut qualifier de la sorte un thriller, avec son lot de flics aux tempéraments variés, les investigations dans le voisinage, les alibis des proches, l’intervention du médecin légiste quasi divertissante si on considère le comportement et l’humour du personnage, l’enquête qui stagne… toutefois la deuxième partie montre une rupture après la présentation du crime et l’enquête et je dois avouer que je me suis un peu ennuyée face à cette présentation des nouveaux intervenants, de leur parcours et de cet aspect documentaire que prenait le roman.

Il s’agit donc pas que d’un roman policier, mais d’un écrit qui expose les méandres du cerveau et de la mémoire montrant comment son fonctionnement offre des possibilités de manipulation sur les individus. Un roman malgré tout bien ficelé.

La dernière page m’a mise très mal à l’aise, je me suis demandé si je devais saluer le génie de l’autrice ou me sentir à la fois culpabilisée et piégée. Cela a quelque peu atténué le plaisir de lecture que j’avais éprouvé dans la première partie. Dans quel but Chrystel Duchamp nous sert les trois dernières lignes. Serait-ce de la dérision, une farce montrant sa capacité à bluffer le lecteur ? Je n’y répondrai pas, mais vous, qui passez par cette chronique, vous trouverez peut-être des éléments de réponse.

 

jeudi 10 avril 2025

Un avenir radieux













Pierre Lemaître

Ed Calmann Levy, 21/01/2025, 592 pages



J’ai été enchantée de retrouver les personnages de Pierre Lemaitre attendus depuis un certain temps et de les apprécier d’autant plus que je les connaissais bien. L’auteur les a façonnés et amenés avec leurs défauts, leurs qualités, leur tempérament, et ce qui m’a amusée, c’est que face à une situation donnée, j’ai pressenti les réactions de chacun des adultes face à diverses situations. Les enfants, on les a vus grandir, principalement Colette, cette petite fille à peine éduquée par une mère toxique, aimée de ses grands-parents, et qui au cours de ce tome, prend de l’assurance et saura nous surprendre !

Je me suis retrouvée plongée dans cette famille, qui, même si elle sort de l’ordinaire avec ses membres appelés à la célébrité, m’a simplement rappelé la mienne avec les liens qui se tissent entre les personnes, les inimitiés, les affinités, l’oubli momentané des différends dans les situations douloureuses, la solidarité qui s’exerce dans ce cas.

Comme dans les tomes précédents, l’auteur divisent son récit en sortes de volets qui se succèdent, ce qui brise habilement la monotonie d’un récit :

Le volet Geneviève, celui que je préfère, où il est question de cette femme manipulatrice qui peut paraître sotte mais qui se montre capable des pires calculs pour arriver à ses fins. Sa méchanceté m’a fait bondir à maintes reprises.

Le volet François, qui se retrouve malgré lui au sein d’une machination orchestrée par les services secrets, volet qui m’a souvent ennuyée, les services secrets n’étant pas au centre de mes intérêts.

Le volet des parents qui vieillissent et qui maintiennent le lien entre les enfants et leurs conjoints, une bien longue histoire à présent.

Ce livre m’amène à penser que j’aime les sagas, bien que je n’en ai pas lu énormément alors que je me rends compte que je m’éclate avec cette littérature.

Un regret, apparemment, il s’agit du dernier tome et je reste sur ma faim Par rapport à la situation d’un des personnages qui n’aboutit pas, peut-être n’était-ce pas prévu par l’auteur. Je suis disposée à en parler en MP, je serais curieuse de comparer mon ressenti avec celui d’autres lecteurs.

 

samedi 1 février 2025

 Tsunami












Marc Dugain

Ed Albin Michel, 28/08/2024, 240 pages


Il est un président de la République française, mais il est avant tout un homme, et dans ce court roman à la fois uchronie et dystopie, il livre son journal intime. Il déclare vouloir être vrai dans ce journal, ce qui montre que le milieu politique ne l’est pas toujours, il le reconnaît, il en fera la démonstration dans cet exposé. Je parle d’exposé, je pourrais dire documentaire, on pourrait parfaitement imaginer un journaliste le suivant pas à pas dans sa vie d’homme comme de président.

Ce roman de Marc Dugain est vraiment très intéressant, il montre comment, moi, présidente, je serais amenée à mentir pour la bonne cause, à tuer indirectement, tout en considérant une telle décision comme un acte réfléchi pour la bonne cause, en pesant bien le pour et le contre, comment les regrettables accidents qui jonchent ma route font partie des heureux hasards qui me permettent de sauver ma peau de présidente, et comment j’accèderais au pouvoir, les pieds et poings liés par les menottes du protocole, par les conseils avisés de mes diplomates, conseillers et autres ministres.

Le roman tourne à la dystopie et fait peur, car les décisions et projets de lois mentionnés prennent leur source dans des faits actuels et bien réels que nous connaissons tous : la manipulation par les GAFAM, les algorithmes et la surveillance des individus qui en découle. Premier élément anxiogène, qui fait de ce roman une uchronie. Big Brother n’est pas si loin !  Le deuxième élément étant un Poutine psychopathe sans empathie et assoiffé de pouvoir, mais je stoppe là la description afin que d’éventuels lecteurs puissent découvrir ce personnage.

On découvrira également le côté obscur du pouvoir qui vous donne cette célébrité qui vous saccage la vie privée. Peut-on après cette lecture, voir le président d’un autre œil ? Je pense à notre actuel président et son épouse, se déplaçant main dans la main, pour éviter les interprétations douteuses des journalistes, j’y pense parce que l’auteur de ce livre ne manque pas de décrire des attitudes de son héros et de sa femme, en prévision de ce que pourraient mentionner la presse.

Je ne regrette pas cette lecture édifiante même si parfois, le texte paraît long à qui n’aime pas la politique.

 

mercredi 29 janvier 2025

Madelaine avant l’aube












Sandrine Collette,

Ed JC Lattès, 21 août 2024, 252 pages


Il est quelque part, coupé par la rivière Basilic, un hameau que l’on nomme « les Montées ». Un hameau perdu dans un coin de campagne, ou nul ne peut se rendre car il existe dans l’imagination des lecteurs qui l’ont découvert, il représente l’ensemble des hameaux perdus de nos contrées. On aurait bien envie aujourd’hui de la qualifier de coin de paradis, mais gardons nous bien de l’envisager sous cet angle : les gens n’y vivent pas, ils y survivent et ils y meurent, et ils triment, bien que le fruit de leur travail, ils ne le voient pas, la vie est ainsi faite, ponctuée par les famines, les maladies et les actes répréhensibles du fils du maître des lieux. Les maigres joies de l’existence viennent de cette vie en communauté, maigres réjouissances qui parfois parviennent à réchauffer les cœurs.

Dans cette vie de misère, surgit de nulle part, une enfant perdue, elle est adoptée par Ambre, la femme en mal d’enfant qui la nommera Madelaine. Et Madelaine tente de réveiller les habitants du hameau par son comportement et son tempérament qui refuse la soumission, Madelaine n’est que colère face à cette acceptation ancrée dans la nuit des temps, elle est celle qui donnera toute sa saveur au roman.

Dans ce magnifique quoique terrible récit d’une grande noirceur, er bien que très peu de renseignements sur l’époque soit précisée, Sandrine collette décortique la vie de ces paysans de l’ancien régime, elle introduit le lecteur dans leur quotidien effroyable qui amène à réaliser ce que fut vraiment cette vie misérable. Certaines descriptions de maladies qui se développent ou d’effets de la famine et des actions qui en découle sont difficile à supporter, et pourtant, telle fut la vie dans les campagnes. C’est sous cet angle que j’ai abordé ce roman.

On notera une allusion révoltante à l’Eglise et à sa façon de vouloir contenir le peuple, peuple qui se tait, fait magnifiquement traduit par l’absence de dialogue dans le récit.

Ce roman est un chef d’œuvre.

mercredi 22 janvier 2025

 Sur un mauvais adieu





Mickael Connelly

Ed Livre de poche, 28/03/2018, 448 pages


Je m’étais contentée de lire le poète parce qu’il s’agissait d’un classique et je n’étais pas revenue voir du côté de ce grand auteur de polars. Le challenge solidaire m’y invitant, j’ai choisi celui-ci un peu au hasard et un peu parce qu’il semblait bien apprécié des babeliotes. Je n’ai pas regretté cette lecture, d’abord parce que ce livre m’a amenée à faire connaissance d’un policier bien sympathique que je ne connaissais pas, ensuite parce que la double intrigue avait de quoi nourrir ma curiosité.

J’ai donc côtoyé le désormais célèbre Harry Bosch, et ce personnage m’a tout de suite plu : individu sûr de lui, ayant réponse à tout, ne craignant pas l’autorité supérieure, un tantinet transgresseur et ô combien méthodique et réfléchi. Les deux enquêtes qu’il mène pour le régal du lecteur montrent le travail d’un homme organisé, qui ne se laisse pas déborder, bien qu’il retarde toujours les moments d’intimité avec sa fille.

Il réfléchit vite et bien, Bosch, même quand il s’agit de donner l’assaut dans une situation d’urgence extrême, et il se donne les moyens d’aller jusqu’au bout de ses investigations. Je n’ai qu’une envie en refermant ce roman, c’est de reprendre le cycle Harry Bosch en commençant pas le commencement afin de faire plus ample connaissance du personnage.

Question intrigue, on est servi ! Une enquête privée confiée au policier, par un milliardaire qui lui demande de rechercher un probable héritier, et,  cerise sur le gâteau, cette affaire sera confidentielle, seul Bosch et le lecteur en connaîtra les tenants et les aboutissants, ce secret amènera notre héros à faire fi des règlements au SFPD, ce qui ne le contrariera aucunement !

La deuxième enquête est plus officielle et apporte du dynamisme au roman : un sérial violeur sévit dans les parages, c’est classique, mais les investigations sont passionnantes.

Ce policier n’est plus tout jeune, mais il tient la route, se montre réactif et compétent, comme il l’affirme : être policier, c’est dans son ADN.

Je crois que je vais encore faire grandir ma PAL afin de faire plus ample connaissance avec ce personnage.

 

dimanche 19 janvier 2025

 Cœur d’amande

 











Yasmina Khadra

Ed Mialet Barrault, 21/08/2024, 320 pages


Yasmina Khadra nous régale une nouvelle fois, avec ce roman qui pour moi, est une nouvelle pépite. Il nous raconte l’histoire de Nestor, dit Cœur d’Amande, né avec une atteinte d’achondroplasie, et qui connut son lot de souffrances lié à ce nanisme.

J’ai beaucoup aimé ce personnage façonné par son créateur, je m’y suis attachée, souriant à ses réflexions, m’apitoyant sur sa situation, pestant parfois dans les passages qui montre un Cœur d’amande bien entêté, peu disposé à coopérer et parfois agressif. Un personnage admirable, qui regorge de culture, montre sa gratitude, sa logique, son sens de l’humour par de spirituelles répliques.

Je n’ai pas apprécié que le personnage. Me demandant pourquoi l’une de mes amies qui avait emprunté ce roman se l’est procuré après lecture, j’ai compris, on peut en relire certains passages qui sont des leçons de vie : Nestor, dévoué à cette « Mamie » qu’il adore parce qu’elle lui a tout donné, se révolte quand il voit la vie de son aïeule et la sienne exploser, se disperser. On verra arriver Kader son ami, qui tente de le secouer, de faire sortir de son déni, de le réconforter en vain en lui le plaçant face à une réalité qu’il n’est pas prêt à accepter grâce à des arguments pleins de bon sens. Par la suite, c’est Nestor qui tentera de remonter le moral de son ami Léon dans un magnifique passage emprunt de philosophie.

Bien plus que la simple histoire d’un individu que la vie n’a pas épargné, ce livre aborde des thèmes variés et passionnants : l’histoire d’un personnage qui esquive les écueils, qui trouve une belle porte de sortie pour une ascension méritée, l’histoire de la solidarité qui peut régner dans un quartier de Paris que la rumeur livre à la géhenne, l’histoire de belles amitiés et de ce que suppose ces amitiés : bon moments, franchise, discussions et désaccords, l’histoire de la vie et de son triste déclin par lequel nous passerons probablement. Cœur d’Amande est porteur de tout cela et le communique de façon efficace, le lecteur marche à ses côtés durant ce travail de deuil qu’il effectue.

Les chapitres qui terminent le roman sont superbes, je n'en raconte pas trop, je citerai simplement ce dicton : Aide-toi, ciel t'aidera...

Merci encore à Yasmina Khadra d’avoir donné vie à Nestor, cette belle personne.

Ce livre est à lire et à relire.