Murène
Valentine Goby
Ed Acte sud
J’en étais déjà convaincue, et ce livre n’a fait que renforcer cette
conviction : on devrait se lever chaque matin en remerciant le ciel d’être
en bonne santé et valide comme ce fut le cas de François jusqu’à l’âge de 22
ans, beau jeune homme plein de vie qui perd ses bras suite à une électrocution.
Ce roman très bien écrit, invite fortement le lecteur à réaliser ce que
peut être le calvaire d’un homme sans bras, et qui, dans les années 50 ne peut
espérer de prothèse efficace. Regard des autres, vie quotidienne réclamant une
assistance pour chaque geste : se laver, s’habiller, manger… dépendance
totale. On imagine alors l’état de déprime dans lequel François se retrouve
après sa résurrection : il n’est pas mort, mais il n’est pas vivant non
plus, ainsi se qualifiera-t-il de « non mort ». Comment recommencer à
mordre à belles dents dans ce cadeau qu’est la vie quand le cadeau devient
empoisonné.
Ce récit, et c’est merveilleux, n’a rien de pessimiste : François va devoir
s’adapter, et au terme d’un travail de deuil, deuil d’un corps valide, et avec bien des moments de découragement, apprendre à se réjouir d’une réussite aussi petite soit-elle, il va s’ouvrir
aux autres, et sauver des proches qui partagent sa condition d’handicapé.
Ce livre s’adresse à tout lecteur qui ne réalise pas ce que c’est d’être
mutilé, de subir le regard d’autrui, d’être rejeté, de trouver sa sécurité au
milieu d’autres personnes partageant une condition similaire (ce que François appellera
un ghetto).
Admirable la documentation de l’auteur, tant d’un point de vue médical que
matériel, et de la psychologie d’une personne lourdement handicapée.
Un livre que je recommande !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire