L'apothicaire
Henri Loevenbruck
ed Flammarion, livre de poche
Où l’on fait connaissance d’un personnage érudit, athée,
original, attachant et qui semble bien
avoir plus d’un tour dans son sac ! Andréas St Loup, apothicaire de son
état, se retrouve malgré lui, au centre d’une grosse machination, écartelé
entre les frères Marigny (le chambellan et ministre de Philippe IV le Bel et l' évêque de Sens,
Guillaume de Nogaret, le conseiller du roi, et Guillaume Humbert, l’inquisiteur général du royaume de France, bien tristement
célèbre.
Avec son apprenti, Robin, et Magdala, dite « la
Ponante », prostituée au grand cœur, ils formeront une équipe de choc pour
fuir vers le sud, sauver leur peau et résoudre une énigme bien mystérieuse :
retrouver les traces d’un personnage qui a disparu des mémoires et ce, malgré l’ordonnance
du roi invitant tout le royaume à mettre fin à leurs déambulations.
Andréas et son équipée
sont donc poursuivis, et en tant que lectrice, j’aime particulièrement les personnages
en fuite qui sont à l’origine de récits en général très intéressants et plein de
suspens.
Dans ce roman, Andréas est doublement poursuivi : il tente
constamment de distancer l’inquisiteur, mais il se retrouve également poursuivi par deux mystérieux chevaliers,
style chevaliers de l’apocalypse, dont on percera le mystère dans une bonne
deuxième moitié de l’histoire.
A la même époque, Aalis, fille de drapier de Bézier, après
quelques « ennuis » avec sa famille et le prévot de Bézier décide de
fuir cette ville pour se rendre à Bayonne, bien que cela ne soit pas aisé
lorsqu’on se sait poursuivi par les autorités et que le gibet vous attend en
cas d’échec.
L’histoire, rapporté par quelque narrateur qui met le
lecteur dans la confidence, est fort plaisante à lire : passé la surprise
des premières pages et une fois attaché au personnage d’Andréas, les tournures
de phrases d’un intellectuel qui aime à manier le verbe, de préférence dans un
style rappelant l’époque médiévale n’importuneront aucunement le lecteur, bien
au contraire ! On y jouit du contraste provoqué par les différents
registres de langue employés par chacun : Magdala et son langage des rues
qui tranche avec le discours d’Andréas, ce même discours d’autant plus épicé
que le pauvre robin a encore tout à apprendre, de l’apothicaire comme de la
prostituée.
Le roman m’a apporté une nouvelle somme de connaissances sur
cette passionnante société médiévale dont je connais quelques aspects mais au
sujet de laquelle il y a toujours à apprendre.
Découvrir que l’homme était alors en perpétuelle recherche
de progrès, même si les croyances de cette société avaient la vie dure et qu’un
Andréas St Loup risquait fort de passer rapidement pour hérétique en
critiquant, voire en rejetant certaines idées bien ancrées comme s’opposer déjà à
cette époque, aux saignées, parler d’hypothétiques organismes invisibles parce
que minuscules, à l’origine de bien des maladies, avancer que les lentilles
permettraient un jour bien des progrès… St loup met bien en évidence tout ce
savoir que l’on ne possède pas encore en 1300.
On apprend encore bien des pratiques et des techniques à la lecture de
ce récit : le travail des drapiers, la construction des murs, la
fabrication de la dynamite, les astuces des templiers pour ouvrir des passages
secrets dans les commanderies, les mœurs des loups, les effets des plantes… ma
liste n’est pas exhaustive et cet apport de connaissance fait une grande partie
de l’intérêt de ce roman, même si là n’est pas ce qui fait battre le cœur de ce
pavé, non, ce qui fait de ce livre un refuge pour le lecteur, c’est sans aucun
doute un suspens parfois intenable qui vous transforme en grosse paresseuse qui
ne pense qu’à lire parce qu’on a envie de savoir, c’est le deuxième livre d’Henri
Loevenbruck que je dévore, le premier m’avait
fait exactement le même effet, ce genre de livre qui vous habite jour et nuit
tant que vous n’êtes pas arrivé à la fin et qui continue à vous hanter ensuite
pour laisser très longtemps un souvenir impérissable.
Si vous aimez l’histoire, particulièrement le moyen-âge
tardif, si vous raffolez le suspense à outrance, si vous appréciez un soupçon d’ésotérisme, ce livre est pour
vous !!!! j’ai beaucoup aimé tous les romans que j’ai lu depuis le début
de l’été, mais celui-ci détient la palme des coups de cœur pour l’année.
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