Moi, Tituba, sorcière
Maryse Condé
Ed Folio, 13/09/1988; 288 pages
C’est grâce à la plume
magnifique de Maryse Condé que j’ai fait connaissance de Tituba, dont ne
subsistent que quelques informations aujourd’hui. Tituba serait née avant les
années 1670 quelque part en Amérique du sud et aurait été amenée à la Barbade
après avoir été vendue comme esclave, puis rachetée par un Pasteur, Samuel
Parris et emmenée à Salem dans la région de Boston.
A quelques détails près, l’autrice
raconte sa vie dans un récit certainement proche de la réalité, du moins ce qu’on
en connaît. Quel parcours difficile que cette route de souffrance de l’esclave !
Maryse Condé s’est attachée à cette femme à la situation certainement
représentative de la condition des esclaves au XVIIème siècle, mettant l’accent
sur la pratique religieuse des blancs qui n’est aucunement basée sur l’amour du
prochain mais sur le pouvoir que confère l’appartenance à une communauté
dominante, l’effacement de la culture des Africains assimilés à du bétail,
coupables désignés de tous les maux, ce qui s’avère confortable pour les
maîtres.
Maryse Condé présente une femme
dont on suit la vie avec grand intérêt, une femme qui avance à coup de machette
dans la vie, une femme bonne, aux qualités multiples, bien surprise de se voir
qualifier de sorcière, terme qu’elle semble à peine connaître, une femme
aimante pour les hommes qu’elle croisera sur son chemin, des individus souvent
peu scrupuleux qui semble bien résumer la vision des hommes de l’écrivaine,
sans généralisation toutefois.
L’autrice mets également l’accent
sur le puritanisme des chrétiens, leur vision manichéiste de la vie, leur peur
du malin omniprésent dans le quotidien, et dont ils se déchargent sur tout ce
qui ne leur ressemble pas et qu’ils éliminent de leur esprit à coup de
confession et de prière.
La question que je me suis
posée tout au long du roman : Tituba est-elle une sorcière ? La
réponse est une question d’appréciation de ses actions. Si on considère qu’elle
est capable de « dits » sortilèges que je laisse aux futurs
lecteurs de ce récit le soin de découvrir, on affirmera qu’elle remplit les conditions
qui en font une femme capable d’agir sur les éléments et les individus. Sa
volonté, tout au long de son parcours, de soulager, de guérir, d’apporter la
paix avec les moyens à sa disposition dans la nature et quelques qualités
indispensables à son travail, telles la psychologie et l’intuition n’en font une
sorcière que par rapport à une époque donnée, une époque où ce que l’on n’expliquait
pas était l’œuvre du diable et les sorcière leur instrument.
Ce roman fait partie de mes
pépites de cette année, je me suis laissé bercer doucement par cette
merveilleuse autrice à l’écriture à la fois douce, ferme et ciselée. C’est le
deuxième roman que je lis, le premier étant rêves amers que j’ai également
beaucoup aimé. Je ne compte donc pas m’arrêter là !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire